Histoires de Français Libres - Bataille de Médenine - Calots Rouges

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Bataille de Médenine

 

Dans "Calots Rouges et Croix de Lorraine"

 

Page 50

A l'arrivée de la "Colonne Volante" en Tunisie, les éléments avancés de la VIIIeme Armée avaient repoussé les forces de l'Axe sur la ligne Mareth. Cette position étendait ses trente kilomètres de fortifications entre la mer et le massif montagneux des Matmatas. Construite par les Français avant la guerre, elle avait été renforcée depuis par ceux contre qui elle avait été construite.

Toutes les troupes italo-allemandes étaient alors regroupées sous le commandement du maréchal Rommel qui décida de desserrer l'étau qui le menaçait par une série de contre-attaques.

L'une d'elles culbuta le IIeme Corps U.S. dans la région de Gafsa et le ramena à la frontière algérienne.

L'autre, plus ambitieuse encore, espérait détruire une partie de la VIIIeme Armée. Fixant les forces au contact de la ligne Mareth par la 1ere Armée Italo-Allemande, Rommel comptait lancer quatre divisions dont trois blindées à travers les Matmatas pour capturer tout le dispositif offensif de Montgomery. C'était l'opération Capri.

Le 2 mars, la "Colonne Volante" fut placée avec la 4eme Brigade légère blindée aux ordres du général Freyberg commandant la 2e division néo-zélandaise.

Après relève des éléments légers britanniques au nord de Tatahouine, la colonne remania peu à peu son dispositif dans les journées suivantes de manière à marquer au plus près les forces ennemies susceptibles de déferler des Matmatas sur la route Médénine-Tatahouine.

Les automitrailleuses devaient surveiller les Oueds Gragour, Temiafet et Smar, les chars et les autocanons étaient maintenus en réserve.

Au sud, s'ouvrait largement l'oued Gragour, aussi le peloton Oddo qui en était chargé fut-il renforcé par le peloton d'autocanons Gerberon et un groupe porté; poussant ses investigations les 4 et 5 mars, il ne put prendre contact avec l'ennemi que par des patrouilles à pied et dans la montagne.

Les deux autres pénétrantes étaient confiées aux pelotons Moore et Breton.

Tous ces détachements, assez éloignés du P.C., se repliaient à la nuit tombée pour former des "leagers de nuit" isolés et reprendre leur position avant le lever du jour.

Le 6 mars au matin fut lancée l'opération Capri. Voici comment le sous-lieutenant Moore vécut son déclenchement :

"Vers 4h du matin, je suis réveillé par un ronronnement furtif de moteurs dans le lointain et comprend immédiatement qu'il s'agit de véhicules qui se mettent en place, en 1ere vitesse et au ralenti, pour déboucher au lever du jour et attaquer. Certain de ne pas me tromper je décide d'alerter immédiatement le lieutenant Troquereau...

...Le jour n'est pas encore levé; il doit être aux environs de 4h30.

Tout le monde est réveillé et prêt en un instant; Breton manifeste le désir de se rendre immédiatement en bordure de l'oued Temzafat pour voir ce qui se passe. Je l'y autorise en lui recommandant la prudence et attend les ordres du lieutenant Troquereau...

Celui-ci me donne l'ordre de partir immédiatement prendre ma position habituelle.

Mon peloton (2e) se met en marche dans l'ordre suivant :
A.M. Moore, dont la tourelle a été retirée à Ben Gardane et remplacée par le montage d'un canon allemand de 28/20 récupéré avec deux caisses d'obus.
A.M. canon de 25 (Mdl Barboux).
A.M. standard (Mdl Aletti).

Le levant commence à s'éclairer... Au moment où le peloton est dans la situation la plus critique (mon automitrailleuse ayant traversé un oued et étant remontée de l'autre côté, la deuxième étant dans l'oued et la troisième n'y étant pas encore descendue) j'aperçois au débouché de la vallée plusieurs véhicules ennemis, A.M. et semi-chenillés tractant des canons antichars

J'alerte la "Colonne Volante" et me met en position de tir. L'ennemi continue sa progression normalement, jusqu'au moment où un véhicule (A.M. légère) se trouvant à portée, est mis hors de combat par un obus de 25 de l'A.M. Barboux.

Ce coup de canon de 25, le premier de la journée tiré en direction d'une vallée au petit jour et au but, résonne comme celui d'un canon plus puissant et, rompant le silence du matin, a pour effet immédiat d'amener les semi-chenillés tractant les antichars à faire demi-tour pour se mettre en position de part et d'autre de la vallée où se trouve le peloton Breton. Nous apprendrons plus tard qu'ils ont pris Breton sous un feu nourri, bloquant l'A.M. de tète et ôtant toute possibilité de retraite aux deux autres, et que le peloton a été en grande partie capturé.
"

Cependant Barboux continue à tirer au 25 sur différentes cibles avec des bonheurs divers, et dans l'excitation, Moore, tout à la joie de "casser de l'allemand" avec un de leurs canons, connaîtra plusieurs ratés de percussion successifs sans penser à changer de caisse d'obus.

Le peloton, tout en manoeuvrant pour regagner le gros de la colonne, mènera seul un combat retardateur d'une demi-heure, permettant au gros d'intervenir.

Au moment où Moore, rejoint par Troquereau, va se mettre en observation à défilement de tourelle, son A.M. est touchée et mise hors d'usage sans qu'il y ait de blessés. Le lieutenant Troquereau lui donne alors sa propre A.M. de commandement.

Pendant ce temps, le chef d'escadrons Roumiantzoff, alerté par Troquereau est arrivé avec deux pelotons d'autocanons et le peloton de chars Galley, et l'ennemi, qui croit sans doute avoir affaire aux automitrailleuses anglaises que nous avons relevées, continue sa progression comme à la parade.

Il reçoit alors les premiers coups de canon sérieux (75 des autocanons) par son 3/4 arrière. Le spectacle en vaut la peine, car avant ces premiers coups de 75, l'ennemi se déplaçait en colonne de véhicules divers, parmi lesquels on remarquait aussi bien des MkIII et IV que des chars Skoda, des camions anglais et même des Jeeps.

Le peloton d'autocanons Ballarin n'a même pas pris le temps de se mettre en batterie à l'abri tant la nécessité de riposte est urgente. Il fait tirer ses pièces en tir direct et à découvert, enregistrant des coups au but nombreux.

La section de chars de l'adjudant Malin qui était détachée auprès de Troquereau, fut lancée contre des éléments ennemis qui s'étaient infiltrés dans le fond de l'oued Gragour et menaçaient l'échelon A de la Colonne. Elle tomba sur de l'infanterie débarquant de ses véhicules, lui infligea de sérieuses pertes, détruisit un char et put dégager l'échelon.

Le combat devint alors général.

Le capitaine de Courcel avait été envoyé barrer la route Médénine-Tatahouine avec un détachement comprenant le peloton d'autocanons Baumann et la section de chars Touny. Il réussit à bloquer la progression ennemie vers le sud, détruisant un char et neutralisant un canon antichar.

Dans son compte rendu du combat Moore raconte encore, comment il fut envoyé en renfort auprès de ce détachement : "Se rendant sur les lieux de cette nouvelle mission, Moore est arrêté par un général britannique qui lui dit revenir du P.C. de la "Colonne Volante" et qui se trouve dans l'impossibilité de regagner son propre P.C. (il devra assister au spectacle toute la journée). Il est dans son A.M. Humber à défilement de tourelle. S'étant enquis de la mission assignée à Moore, il lui indiqua qu'il y avait un Mk IV embossé dans l'oued proche et qu'il sera tiré "comme des pipes à la foire" dès qu'il sera à découvert.

Moore reprend néanmoins sa progression tout en scrutant avec anxiété l'oued en question, et verra effective ment le coup de départ et simultanément sentira l'impact de 75 qui vient de traverser son A.M. de part en part tandis que le souffle le projettera hors de sa tourelle dans les cactus, sans blesser personne. Cette A.M. sera abandonnée rapidement, non sans que Moore ait pu converser avec le chef d'escadrons Remy grâce à sa radio intacte, après récupération des armes. Le peloton Moore se mettra finalement aux ordres du capitaine de Courcel réduit à une seule A.M.
"

La compagnie de chars, amputée de deux sections, fut alors lancée en contre-attaque. Dès son débouché, elle fut reçue par des tirs ajustés d'armes antichars que l'ennemi avait eu le temps d'installer. Un char fut immobilisé, un autre sérieusement atteint (section Beaugrand) et deux hommes d'équipage tués.

La section Galley tenta de déborder ces antichars mais dut y renoncer après avoir encore perdu un char.

Chez l'ennemi, un char Skoda avait été détruit, mais en face des canons de 88, les 2 et 6 pounders de nos chars étaient bien impuissants, aussi la contre attaque fut-elle ramenée sur sa base de départ.

Vers le milieu de la journée, des mouvements d'infanterie furent signalés sur les crêtes dominant l'oued Gragour et la valeur de deux compagnies d'infanterie commença à descendre dans l'oliveraie de Bir el Amar où se déroulaient de violents combats. N'ayant pas les moyens de résister à une attaque d'infanterie, le chef d'escadrons Rémy demanda et obtint l'autorisation de se replier sur de meilleures positions, plus au sud.

Le détachement Oddo, qui avait été rappelé de sa mission au fond de la vallée, fut envoyé occuper une partie de cette position.

Lorsqu'il fut rejoint par le reste de la Colonne, celle-ci fut soumise à un violent bombardement par canons de 88, dont les obus, tirés avec une très grande vitesse initiale, arrivaient avant que ne soit perçu le coup de départ. Une automitrailleuse et un autocanon furent détruits, un spahi et un chasseur tués.

En fin d'après-midi, le peloton Moore signala sur la droite, le mouvement de 4 chars et une A.M. ennemis qui avaient traversé la route Médénine-Tatahouine, et se dirigeaient vers le sud est. Une patrouille de Spitfire leur fit faire demi-tour.

La progression ennemie semblait désormais stoppée et la Colonne se replia de quelques kilomètres pour la nuit et former le leager de nuit. Le capitaine de Courcel fut blessé en couvrant ce repli, mais ne se fit pas évacuer.

Le lendemain à l'aube, une patrouille composée du peloton Oddo renforcé de l'autocanon de Villaret fut envoyée en observation face à l'oliveraie de Bir el Amar. Quelques mouvements de véhicules y furent décelés. Ce détachement eut l'heureuse surprise de voir arriver le sous-lieutenant Breton avec son équipage. La veille au matin, comme nous l'avons vu, son peloton avait été surpris par l'attaque allemande et ses blindées détruites. Breton avait réussi avec son équipage à se réfugier dans la montagne, d'où il avait assisté à tous les combats. A la nuit tombée, il descendit de sa cachette pour essayer de rejoindre la Colonne.

En début d'après-midi, la patrouille en observation fut rejointe par le chef d'escadrons Roumiantzoff accompagné de Moore et de trois chefs de peloton, Galley et La Selle pour les chars et Baumann pour les autocanons. Les ordres furent brefs et devaient rester célèbres dans la cavalerie :

"Mission : on va essayer de reprendre l'éolienne" (il s'agissait de l'éolienne de Bir el Amar qui avait été la veille le point central de l'activité ennemie). "On verra bien comment ça se passera !.
Ennemi : C'est le même qu'hier
Terrain : Vous l'avez devant vous
Moyens : C'est nous et personne d'autre
Départ : dans un quart d'heure.
Questions ?
"

Deux questions timides, posées sur les mines et sur les 88, reçurent alors les réponses suivantes :

"Les mines, si vous allez très vite elles sautent derrière vous.
Les 88, ça ne vous attrape pas à tous les coups.
"

Tout se déroula comme à la manoeuvre. Automitrailleuses déployées en tète, chars à 500 m derrière et auto-canons en appui. Après un premier bond dans l'oued Gragour, puis un deuxième à l'éolienne, les automitrailleuses se postèrent un kilomètre plus loin, sur les crêtes d'où l'ennemi avait reçu son coup d'arrêt la veille. Les 88 se mirent de la partie, mais comme "ça ne vous attrape pas à chaque coup", elles visèrent Oddo qui était posté au marabout de Sidi Ahmed el bou Ah, mais atteignirent le peloton Moore sans rien détruire.

Par contre, les mines explosèrent non pas derrière mais sous l'autocanon Villaret et sous le véhicule de commandement de Baumann, heureusement sans tuer personne.

En fin d'après-midi, liaison était prise avec des automitrailleuses néo-zélandaises venant du nord.

L'attaque ennemie sur Médenine avait été repoussée partout.

Voici les conclusions du rapport du chef d'escadrons Remy : "Il semble que l'intervention brutale de la Colonne Volante sur le flanc de l'attaque ennemie ait surpris le commandement allemand et ait dérangé ses plans. La prudence et le peu de mordant dont l'ennemi a fait preuve à partir de l'intervention de la Colonne montre que, dès le début de notre action, nous avons acquis la supériorité morale sur lui."

Le général Montgomery qui, grâce à l'action de la Colonne avait évité la menace d'un enveloppement par le sud, adressa ses félicitations personnelles avec un télégramme : "Well done".

Celle du général Freyberg étaient moins laconiques : "En repoussant hier l'attaque du "Groupe Kiel" allemand, vous avez supprimé la menace sur notre flanc sud. Veuillez accepter pour vous-même et transmettre aux officiers, sous-officiers et soldats sous vos ordres mes félicitations personnelles."


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