Page 210 - Tunisie, 6 mars 1943
Tandis que les forces alliées sont arrêtées devant les lignes allemandes dans le Sud Tunisien, la Free French Flying Column reçoit la mission d'assurer le flanc-garde sud-ouest du dispositif.
A 7 h. 45, une forte colonne allemande de chars d'assaut se présente sur la route de Médenine à Foum-Tatahouine. Le feu des autocanons, ouvert à plus de 1.000 mètres, oblige l'ennemi à s'embosser dans les oliviers et derrière les murettes, puis à tenter de déborder les Français par des manoeuvres d'encerclement.
Un duel s'engage au canon, où les Allemands possèdent certainement la supériorité technique par la valeur de leurs engins et, peut-être aussi, la supériorité du nombre.
La lutte est sévère. Lorsque, après le premier choc, l'ennemi pense les Français suffisamment ébranlés, une voiture blindée allemande fonce sur la route à toute allure dans le dessein d'en ouvrir le passage. Elle est appuyée par les feux de flanquement de chars embossés de part et d'autre. Un de nos autocanons l'attend à courte distance et la détruit en deux coups au but. C'étaient les deux derniers obus qui lui restaient dans son coffre à munitions.
Plus loin, un autre autocanon, repéré par l'artillerie allemande, est touché de deux coups directs et immobilisé ; tout l'équipage est blessé, à l'exception du pointeur. Le chef de peloton monte lui-même sur la tourelle et sert la pièce, jusqu'à ce qu'un troisième obus mette définitivement la voiture hors de combat. Le tir sera alors repris par un troisième autocanon, qui subira le même sort: deux fois touché en plein, son moteur arraché et ayant un commencement d'incendie, le tir sera continué sous la direction du même chef de peloton, jusqu'à ce qu'un troisième obus vienne détruire la pièce elle même.
Toute la journée, automitrailleuses, autocanons et chars tiendront tête aux blindés allemands et déjoueront leurs manoeuvres. Finalement ceux-ci renonceront à forcer le passage. Ils se retrancheront sur les hauteurs, puis battront en retraite quelques jours après, amorçant ainsi l'évacuation de la Tunisie.
12 mars 1943
Par une liaison personnelle du Chef d'Escadron Rémy, la Free French Flying Column, qui vient d'Egypte, fait jonction avec la colonne Leclerc, qui vient du Tchad. A partir du 13 mars au soir, elle passe aux ordres du général Leclerc et se fond dans ce qu'on appelle alors la force "L".
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Après, c'est la forêt de Temara et ses guitounes bordées de cailloux blancs, sous la pluie. Séjour maussade, où les Spahis échangeront leurs habitudes de la vie libre du désert et des combats avec les contraintes de la vie de camp. Séjour utile cependant : le 1er R.M.S.M. se reforme, assure sa cohésion, touche son matériel américain, s 'instruit.
Après, c'est l'Angleterre, qui fera du Spahi le plus ferme soutien de la politique d'entente cordiale. Source inépuisable de souvenirs sentimentaux et de salutaires réflexions politico-sociales. Nos Spahis apprendront qu'un peuple libre peut être discipliné. Ils prendront des leçons d'élégance et veilleront au pli de leur pantalon.
Après, c'est le débarquement et la campagne de France, dont on a trop dit qu'elle était spectaculaire pour qu'il ne soit pas juste d'ajouter qu'elle a coûté au Régiment, en tués, blessés, disparus, 50 % de l'effectif débarqué.