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Daniel Jacques Emile Dherbomez - son Livre ouvert !
Dans un bagne marocain : Arsène Lepoittevin  , un péquenot normand chez la Reine / Catherine Ecole-Boivin :
" Tous marchèrent au ralenti pendant une bonne quinzaine de jours. Un de ses nouveaux amis, Derbomez, avait subi comme lui de nombreux mois d'internement cellulaire ; il lui manifesta son désir de s'évader. Dans une petite boite d'allumettes, il collectionna des abeilles et chaque fois que l'une passait à sa portée, il l'attrapait. Il se fit piquer volontairement par ces bestioles tout autour des yeux, en appuyant sur leurs dards, vidant ainsi leur venin pour plus d'efficacité. Le docteur n'y comprenait rien et hésitait à l'envoyer à l'hôpital ; il se méfiait de ces détenus prétendument malades qui profitaient de leur hospitalisation pour s'évader. Arsène, impressionné, s'inquiétait quand même :
- T'es pas jojo, t'as les deux yeux dans le même trou ! Tu as eu bien du courage !
- Oh ! mais un homme mort ne vaut pas mieux qu'un chien en vie, j'ai rien à perdre.
Sa face continuait à enfler, le médecin n'avait plus le choix, il le fit transporter d'urgence à l'hôpital. Dans la nuit, sa tête désenfla assez rapidement. Il prit la porte de bon matin sans être inquiété. Une fois dehors, il chercha à s'éloigner au plus vite de l'hôpital. Trois jours plus tard, on l'intercepta alors qu'il s'apprêtait à monter dans un train en partance pour Casablanca. Les évasions ratées ne faisaient qu'amplifier le sentiment de désespoir de tous.
La matrone continuait de soigner 6109, son appétit revint en une semaine. La femme ne le quittait jamais, elle avait reçu l'ordre de le surveiller, car on pensait qu'il allait se suicider. Etrangement, à Kénitra, on craignait pour la vie du prisonnier 6109. Le contrôle s'effectuait à tous les niveaux ; on choisissait quand les prisonniers mouraient. La nourriture étant meilleure que de coutume, le moral allait mieux, les fouilles devinrent moins outrageantes. On le réintégra dans sa cellule et dès huit heures du matin, il rejoignait ses camarades et participait à de longues discussions. Puis le miracle se produisit : le 8 novembre 1942, un bruit infernal se fit entendre dès le petit matin : des coups de canon, le souffle des obus se frayant un passage au-dessus de la prison pour aller remplir leur mission. Que se passait-il ? Un exercice de tir peut-être ? Non, on ne pouvait y croire ! De Gaulle et les Anglo-Américains débarquaient ? C'est un gardien qui leur donna les dernières nouvelles. Alors, ce fut la folie ! On s'embrassa dès l'ouverture des cellules ce matin-là, et on chanta La Marseillaise tandis que d'autres voix inconnues arrivaient d'autres bâtiments de la prison. Trois jours s'écoulèrent. Tous se disaient « au revoir » chaque soir et, chaque soir, les cellules se refermaient, laissant place au doute. " Laurent le mercredi 30 septembre 2009 - Demander un contact Recherche sur cette contribution | |
